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Traitements, adaptations et évolutions des tumeurs neuroendocrines pancréatiques

Romain CORIAT, professeur des Universités à l’Université de Paris, en charge de l’oncologie digestive sur le site Cochin, décrypte avec nous les tumeurs neuroendocrines dans le cadre de la Journée mondiale de sensibilisation aux tumeurs neuro-endocrines (TNE). Il nous détaille dans cet épisode : Les traitements disponibles en cas de tumeurs neuroendocrines pancréatiques, les adaptations de traitement selon les spécificités rencontrées, l'évolution des prises en charge des tumeurs neuroendocrines pancréatiques, les perpectives d'évolution de prise en charge.

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Retranscription du podcast : Les tumeurs neuroendocrines pancréatiques

Les différents traitements pour lutter contre les tumeurs neuroendocrines pancréatiques

Dans la prise en charge des tumeurs neuroendocrines pancréatiques, il y a différents traitements qui sont disponibles :

  • Il y a des traitements locaux de type radiofréquence, embolisation, chimioembolisation. On privilégie la chimioembolisation à l’embolisation dans les tumeurs neuroendocrines pancréatiques
  • Il y a des traitements plus généraux de type analogue de la somatostatine, chimiothérapie, thérapie ciblée et dans un futur proche on espère probablement l’immunothérapie.

En terme de traitement on privilégie toujours un traitement local ou locorégional quand il est possible plutôt qu’un traitement systémique.

Il faut faire attention sur les traitements locorégionaux, que ce soit la radiofréquence ou la chimioembolisation, car ils ne doivent pas être réalisés quand le patient a eu une duodénopancréatectomie céphalique, c’est-à-dire lorsqu’il a eu une chirurgie qui enlève la tête du pancréas et les voies biliaires, compte tenu du fort risque d’infection lorsqu’on fait une chimioembolisation. Cela est considéré comme une contre indication formelle.

Dans la majorité des cas les patients auront eu une multitude de traitements pendant tout le temps de leur prise en charge et on essaye d’adapter l’agressivité du traitement à l’agressivité de la maladie car on sait que les tumeurs peuvent être très proliférantes à certaines périodes, et à d’autres périodes, même à un stade métastatique, beaucoup plus quiescentes. C’est la raison pour laquelle on envisage des allègements thérapeutiques après souvent des traitements d’environ 6 mois.

En terme de chimiothérapie on privilégie une chimiothérapie à base de 5-fu streptozotocine qui est le traitement recommandé. Mais il existe des alternatives à ce traitement, notamment un schéma de chimiothérapie qui associe du xéloda au témodal qui présente l’avantage d’être entièrement oral.

Les thérapies ciblées contre les tumeurs neuroendocrines pancréatiques

Vous voyez qu’il y a différentes options de traitement et je n’ai pas abordé les autres options que sont les thérapies ciblées, généralement utilisées en deuxième intention. Cela peut être l’afinitor, qui est un inhibiteur de mTOR ou le sunitinib qui est un inhibiteur de tyrosine kinase et qui a un effet anti-angiogénique. Les deux ont été validés par des phases 3 randomisées prouvant leur efficacité dans les tumeurs neuroendocrines pancréatiques, avec un doublement de la survie des patients.

On a donc un arsenal thérapeutique qui est très important et pour gérer les patients on essaye d’adapter une fois de plus l’agressivité du traitement à l’agressivité de la maladie. C’est pour cela qu’il est toujours important de rediscuter de la prise en charge dans des réunions de concertation pluridisciplinaires dédiées de type RENATEN : le Réseau National des Tumeurs Neuroendocrines. En effet, à tout moment on peut rediscuter un traitement local, chirurgical ou systémique.

Comment adapter le traitement d'une tumeur neuroendocrine pancréatique ?

Dans les tumeurs neuroendocrines pancréatiques il existe plusieurs adaptations à faire. L’adaptation peut être faite en fonction de la tumeur elle-même et pour cela l’agressivité de la tumeur est très importante.

On évalue l’agressivité de la tumeur en fonction du grade tumoral. Le grade est défini surtout en fonction de l’index mitotique et du Ki-67 qui sont des marqueurs qui se voient sur la cellule.

On sait que plus le Ki-67 est élevé, plus la tumeur est agressive. Et lorsque le Ki-67 est supérieur à 80%, ce qui signifie que plus de 80% des cellules sont en phase de réplication au moment où on a fait le prélèvement, c’est un signe de très forte agressivité. Le fait qu’il est y ait une très forte agressivité justifie une chimiothérapie. Ainsi, on adapte le traitement pour qu’il soit agressif.

A l’inverse, et même à un stade métastatique, lorsque le Ki-67 est inférieur à 2% ou plus généralement inférieur à 10%, on utilise un traitement par analogue de la somatostatine. Il y a un essai de phase 3 qui a validé ce traitement, à raison d’une piqûre par mois. Cette stratégie, qui est très bien tolérée par les patients, a montré son efficacité aussi bien à visée anti-tumorale qu’en terme de survie sans progression ou en terme de survie globale. Donc vous voyez que les différents traitements s’adaptent en fonction de l’agressivité de la tumeur.

Il y a aussi d’autres adaptations en fonction bien sûr de l’âge du patient ou de la présence de comorbidités. Par exemple, un patient de 85 ans va être moins agressif en terme de chimiothérapie, on va adapter les doses pour avoir une meilleure tolérance. Egalement si les patients ont des comorbidités, que ce soit une dénutrition sévère ou une insuffisance rénale, il faudra modifier les traitements ou les doses car on ne peut pas envisager les mêmes doses pour un patient de 25 ans qui n’a aucune comorbidité que pour une personne de 85 ans qui a une insuffisance rénale et une insuffisance cardiaque.

Quelles sont les évolutions de prise en charge des TNE ?

En terme d’évolution des prises en charge, on a eu depuis 10 ans des périodes assez fastes. C’est pourquoi, comme je le disais tout à l’heure, il est important de rediscuter la stratégie des patients en réunion de concertation pluridisciplinaire dédiée car de plus en plus on est sur une stratégie multimodale. Avec notamment une stratégie radiologique avec de la radiologie interventionnelle, une stratégie chirurgicale même à un stade métastatique, une stratégie de pause thérapeutique ou de chimiothérapie à certains moments de la maladie.

Donc cette stratégie multimodale justifie de discuter des dossiers en réunion pluridisciplinaire. Il a été abordé la radioembolisation à titre d’exemple comme option qui pouvait se discuter dans les tumeurs neuroendocrines, donc un traitement de radiothérapie localisée au niveau du foie. Il a aussi été abordé d’autres traitements comme l’immunothérapie, qui pour le moment est évaluée dans le cadre d’essais thérapeutiques et qui pourrait avoir un intérêt dans les prochaines années. Il faut encore que cette efficacité soit démontrée et celle-ci le sera sûrement, que ce soit pour la radioembolisation ou pour l’immunothérapie, dans un sous-groupe de patients. Il est donc important de ne pas généraliser les traitements et de bien rediscuter des dossiers.

Les perspectives d'évolution de prise en charge des tumeurs neuroendocrines pancréatiques

Concernant les perspectives d’évolution à plus ou moins long terme dans les tumeurs neuroendocrines pancréatiques, il y a l’immunothérapie, qui pour le moment n’a pas entraîné un enthousiasme débordant dans les tumeurs neuroendocrines.

Il y a les traitements de type radiologie interventionnelle car l’amélioration de la technique radiologique, la diminution des toxicités et surtout la combinaison avec de la radiothérapie comme cela a été vu dans d’autres lésions peut être très intéressante.

Il y a aussi l’apparition de la radiothérapie interne vectorisée, traitement que l’on utilise déjà dans les tumeurs neuroendocrines de l’intestin grêle et qui a complètement sa place dans les tumeurs neuroendocrines pancréatiques. Pour le moment à un stade tardif, mais elle présente l’avantage d’être très bien tolérée également. Donc il y a plusieurs évolutions possibles. Ces évolutions vont être bien sûr dédiées à certaines formes de tumeurs neuroendocrines et c’est pour cela que la caractéristique de la tumeur neuroendocrine est un élément primordial dans le diagnostic et la prise en charge.

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